Une première histoire, courte pour commencer, l'une de mes favorites.
Ce matin, dans la forêt enneigée de Boisricard, une fée a vu le jour. Depuis si longtemps, elle dormait d’un sommeil profond. Ses rêves ne parlaient que de la joie et du plaisir de vivre et de voler entre les arbres. Ce matin là, sa rose noire ouvrit ses pétales et la petite fée s’éveilla au monde qui l’entoure. Certes, ses rêves lui en avaient donné un avant goût, mais rien de comparable avec ce qu’elle voyait de ses propres yeux. C’était l’hiver, ses petits membres étaient engourdis, non pas par le froid, mais par la position fœtale que lui avait imposé son trop long sommeil. Elle étira, ses petits membres nus, un à un, en commençant par les jambes et en finissant par les bras. Une fois debout, elle vérifia que ses ailes aux allures de celles des libellules fonctionnaient correctement, et sans plus attendre, elle prit son élan d’un pétale de la rose et s’envola. Au début, son vol était maladroit, mais rapidement il devint gracieux. Elle commença par faire le tour d’un arbre, elle découvrit ainsi Chêne 1255, auquel elle donna son salut, il lui répondit de sa voix forte et monocorde. Elle s’intéressa ensuite au parterre de neige qui jonchait le sol de la forêt. Elle avançait si vite qu’elle laissait des traînées dans la neige après son passage. Elle rencontra Lapin blanc 273, qui prit peur à son arrivée mais qui par curiosité osa lui adressait la parole. Toutes ces découvertes étaient merveilleuses et incroyables pour la fée, et de ce fait, elle voulait toujours faire, voir, rencontrer de nouvelles choses. Elle voleta au milieu de moineaux, elle rencontra les marmottes bien au chaud dans leur tanière, elle vit des lucioles qui comme elle, brillaient dans la nuit, elle s’arrêta devant un ours qui se grattait à un arbre. Elle fut surprise et horrifiait devant le spectacle qu’offrait une meute de loups pourchassant un cerf dont la fin était certaine. Cela lui fit comprendre que ce monde tout nouveau, n’était pas fait que de belles choses. C’est pour cela, que la petite fée décida de retourner dans un lieu plus sur, c'est-à-dire à l’abri dans sa rose noire, cette nouvelle expérience du monde extérieur lui avait déjà apporté beaucoup. Un petit sommeil de quatre ou cinq mille ans ne lui ferait que le plus grand bien. A son prochain réveil, elle aurait oublié une partie de sa dernière sortit comme la dernière fois, il y a deux mille ans. C’est ainsi que va le cycle des fées. Une chose toutefois l’avait attristé elle n’avait pas rencontré d’autres fées, elle aurait tant aimé, faire des rondes comme autrefois. Elle n’avait d’ailleurs pas vu d’autres roses noires. Sur le chemin du retour, elle entraperçut une voie dégagée en plein milieu de la forêt, nul arbre au milieu, la neige ne semblant pas adhérer à son contact, la voie filée toute droite. La fée se décida à la prendre, la nuit était tombée, et pour la première fois, elle vit le ciel et observa la lune, belle et majestueuse, ronde et blanche, envoyant ses doux rayons lunaires. Mais la lune ne souhaita pas saluer la fée, ni même lui accordait un sourire, la lune se mit même à pleurer des flocons de neige. Toute vie dans la forêt se tut, lorsque en face de la fée sur la voie, deux cercles jaunes lumineux firent leur apparition. La fée, curieuse de ce phénomène, alla à sa rencontre. Les deux cercles semblaient faire de même. A une distance raisonnable, la fée s’arrêta pour attendre la venue de ces faux frères de la lune mais eux ne firent pas de même. La fée frappa de plein fouet la façade d’un camion qui d’un coup d’essuie glace, la balaya comme un vulgaire insecte, et elle s’écrasa définitivement sur le bas coté. C’est ainsi que la dernière fée s’est éteinte, en deuil, la lune pleura des flocons toute la nuit.
Kaalook